Les
antibiotiques comme l'étymologie de leur nom l'indique sont
des molécules particulières. Leur originalité est d'agir sur
les micro-organismes vivants en essayant de les détruire. Cela
leur confère des avantages et des inconvénients. Avantages d'agir
sur une cible et de la détruire rapidement, avec comme corollaire
le succès thérapeutique ; inconvénients de se trouver en face
de micro-organismes capables de s'adapter et de se défendre
en leur résistant, avec comme second corollaire l'échec. L'utilisation
trop importante, parfois inappropriée, conduit à l'apparition
de souches résistantes (enquêtes américaines, danoises).
De ce fait, la prescription des antibiotiques demeure tant en
milieu hospitalier (souches de SARM, entérobactéries BLSE.)
que communautaire (souches de pneumocoques résistants à la pénicilline)
un problème de santé publique difficilement maîtrisable, la
dichotomie hospitalière-communautaire s'estompant progressivement
du fait des hospitalisations courtes, des traitements ambulatoires,
et donc des échanges microbiens entre ces deux structures.
Une politique d'antibiothérapie est donc nécessaire, tant
au niveau communautaire qu'hospitalier.
Elle impose une volonté des pouvoirs publics, des médecins,
des patients. Elle nécessite une participation et une compréhension
de tous. C'est pourquoi l'équipe du CHU de Grenoble a élaboré
une politique volontariste consensuelle, réfléchie, pédagogique
mais restrictive.
La politique d'antibiothérapie s'appuie sur :
- Des textes réglementaires
. le décret du 6 décembre 1999 portant création des CLIN au
sein des établissement de santé auxquels il incombe de « prévenir
la résistance bactérienne aux antibiotiques ». « Une attention
particulière sera portée au bon usage des antibiotiques en
collaboration avec les services cliniques, la pharmacie, le
laboratoire de microbiologie et le Comité du Médicament »
(cf circulaire du 29 décembre 2000).
- Des recommandations nationales
. le bon usage des antibiotiques à l'hôpital (ANAES août 1996)
. 100 recommandations pour la surveillance et la prévention
des infections nosocomiales (CTIN 1999)
- Les structures locales
. Le CLIN et ses relais, les correspondants médicaux, doivent
participer à la politique de prescription des antibiotiques
et à l'application des recommandations.
. La Commission de Prescription (s'intégrant ultérieurement
dans le Comité du Médicament et des dispositifs médicaux stériles)
doit proposer aux instances les règles de prescription et
du bon usage des médicaments.
. La Commission des Anti-infectieux présentera des consensus
d'utilisation des antibiotiques, base de la bonne prescription
de ces molécules.
Les choix stratégiques
1/ Ils se fondent davantage sur la nécessité de prévenir la
résistance et sur la qualité de la prescription plutôt que
sur le coût. Même si celui-ci est important (15 % du budget
pharmaceutique), il ne doit pas apparaître en premier lieu.
2/ Ils imposent une aide dans l'utilisation des molécules
nombreuses, selon leur impact bactério-écologique.
3/ En l'absence de système informatique opérationnel de prescription
pour l'ensemble du CHU (2200 lits, près de 500 prescripteurs),
ils nécessitent un recours à l'ordonnance.
Les différentes prescriptions
Même si tout antibiotique devrait être délivré sur prescription
nominative, la structure ne nous permet pas de l'appliquer
in extenso. Aussi les antibiotiques mis à disposition de la
communauté médicale peuvent être prescrits selon 3 modalités
:
- Antibiotiques courants : la plupart des molécules et spécialités
inscrites au livret du médicament sont en prescription libre
avec une dispensation globale (commande de la pharmacie)
- Antibiotiques à prescription contrôlée (liste de 16 molécules
ou spécialités) : ils sont en prescription nominative sur
ordonnance spécifique. La dispensation est nominative au vu
de l'ordonnance. Son intérêt est la possibilité de validation
pharmaceutique, de suivi des consommations, d'évaluation des
prescriptions.
- Antibiotiques réservés (liste de 8 spécialités) dont la
prescription est réservée à des correspondants pour l'antibiothérapie.
Les correspondants sont :
. proposés par les services,
. validés par la Commission des Anti-infectieux,
. Formés par les infectiologues,
. Enregistrés par la pharmacie. Les correspondants du CLIN
peuvent en être l'ossature.
Cette modalité se différencie des précédentes par :
- Une restriction du nombre de prescripteurs (correspondants
médicaux)
- Un accompagnement pédagogique (formation des correspondants
et conférences de consensus diffusées par Intranet).
- Dans tous les cas, une aide à la prescription est disponible
auprès de la Consultation Mobile en Infectiologie, structure
à la disposition de l'ensemble des prescripteurs, 24 heures
sur 24 , 7 jours sur 7.
L'évaluation de ces différentes modalités de prescription
est prévue par l'Unité de Qualitique. Elle devrait permettre
de vérifier sa mise en oeuvre avant de la percevoir progressivement
sur l'écologie du CHU.
Si l'apparition et la diffusion des souches résistantes dépend
aussi de l'hygiène, chaque établissement doit cependant s'engager
à trouver une solution pour maîtriser l'antibiothérapie, adaptée
à sa taille, à ses prescripteurs et à ses habitudes. Le modèle
du CHU de Grenoble, accepté à l'unanimité par la C.M.E, devrait
permettre de mieux faire comprendre qu'une prescription si
courte soit-elle doit être réfléchie et réévaluée.
*Auteurs : J.P. STAHL, Commission des Anti-Infectieux , J.P.
BRION - Commission de Prescription, J. CROIZE - C.L.I.N. du
CHU de Grenoble- « La surveillance internationale de la résistance
aux antibiotiques en Europe : l'heure est à la surveillance
de l'utilisation des antibiotiques». (Euro-Surveillance -
2001 - Vol 6 n° 1).
Pour
plus d'information contacter :
Luc Bournot
Directeur de la Communication CHU de Grenoble
38700 La Tronche
Tél : 04.76.76.50.98. - Fax : 04.76.76.52.14.
Mel :lbournot@chu-grenoble.fr
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