GRENOBLE

Diagnostic préimplantatoire : un enjeu pour le XXIème siècle - Nutrition à l'hôpital.
 

Numéro 5 - décembre 1998 

Diagnostic préimplantatoire : un enjeu pour le XXIème siècle

A l’heure de la réévaluation des “lois de bioéthique” de 1994, Jacques Testart chercheur à l’INSERM et Bernard Sèle Professeur des Universités et Praticien Hospitalier, Biologie de reproduction, CHU de Grenoble dressent un tableau des perspectives qu’offrent les différentes techniques de diagnostic anténatal.

Quête du meilleur enfant ou dérives eugéniques ?
Les deux biologistes partent du principe que l’aspiration à un enfant de qualité est intrinsèquement liée au désir d’enfant. Or la réalisation de ce vœu trouve ses limites dans la faisabilité, la pénibilité, l’efficacité et le coût des actes nécessaires. Sur ces derniers points, les progrès techniques laissent prévoir que l’efficacité et le coût du diagnostic préimplantatoire s’ajusteront à la demande potentielle. Par ailleurs, la pénibilité n’est pas proportionnelle aux exigences des couples ; les actes médicaux nécessaires (ceux de la fivete) étant les mêmes pour la recherche d’une ou de cent anomalies. La vraie question est celle de la validité d’une stratégie de diagnostic préimplantatoire qui prétendrait assurer au couple la naissance d’un enfant “de qualité”: exempt d’anomalies chromosomiques et de maladies héréditaires.

Le diagnostic préimplantatoire, plus qu’un diagnostic prénatal précoce
Le diagnostic préimplantatoire prend mieux en compte les souffrances féminines et peut-être fœtales. Mais il élimine plus largement les embryons porteurs d’anomalies mineures. Quant au diagnostic prénatal, il peut progresser techniquement mais n’offrira toujours qu’un choix binaire : la grossesse est acceptée ou arrêtée. C’est pourquoi l’eugénisme du diagnostic prénatal demeurera fruste et définitivement limité En revanche le diagnostic préimplantatoire, défini par les chercheurs comme une “entreprise au pouvoir eugénique potentiellement inépuisable”, évoluera selon les progrès de la biologie, de la génétique mais aussi selon les exigences sociales et parentales.

La stratégie du diagnostic préimplantatoire
Ce diagnostic doit porter sur de très nombreux embryons simultanément afin de permettre de découvrir au moins un embryon “de qualité”. Or le facteur limitant la production d’embryons n’est généralement pas le nombre de spermatozoïdes mais le nombre d’ovules disponibles. Il s’agira donc d’augmenter la production ovocytaire de la femme, à un niveau bien supérieur à celui qu’autorisent les techniques actuelles. De nouvelles pratiques de superovulation sont en cours d’expérimentation en Australie, aux Etats Unis, à Taiwan, en Grande Bretagne... Elles impliquent la culture in vitro d’ovocytes immatures ou de petits follicules
En ce qui concerne les anomalies chromosomiques, il est aujourd’hui possible de rechercher n’importe quelle aneuploïdie, translocation ou inversion, quant aux maladies héréditaires, nul doute qu’on saura bientôt identifier tous les gènes responsables de maladies monogéniques. Cependant, comme il apparaît difficile d’augmenter sans limitation le nombre de séquences géniques recherchées dans une seule cellule, les biologistes s’orientent vers la possibilité de multiplier les cellules en culture. A Singapour, une équipe a obtenu plusieurs millions de cellules identiques. Dans de telles conditions, il n’y aurait plus aucune limitation technique pour caractériser autant de séquences géniques que le programme Génome Humain serait capable d’identifier. 

Ces méthodes permettront de dresser une hiérarchisation biologique des embryons selon leurs caractéristiques génétiques et de sélectionner le “meilleur” (et non l’embryon “parfait”). 
Dés lors il est indispensable que l’investissement diagnostique considérable à l’origine de son identification soit rentabilisé par la naissance d’au moins un enfant issu de cet embryon. Il faut savoir que les chances d’accouchement dans les conditions actuelles de la fivete ne sont que de 8%. Pour augmenter ce pourcentage, on pourrait avoir recours à une forme de clonage embryonnaire dont le but ne serait pas initialement de faire naître une armée de vrais jumeaux mais d’augmenter la probabilité de naissance d’un enfant. Les embryons clonés cryoconservés seront délivrés un à un dans l’utérus maternel, jusqu’à l’obtention de la naissance désirée.

Loi de bioéthique
“Nous argumentons l’hypothèse que les techniques de biologie actuellement en développement , combinées avec les progrès de la génétique moléculaire, vont venir nourrir les dérives du diagnostic préimplantatoire dans les prochaines décennies. Nous proposons une règle susceptible de contenir ces dérives”   Jacques Testart et Bernard Sèle. Il reste à mettre en accord les exigences justifiées de la loi française et les pratiques d’autres pays car il ne peut exister durablement de dispositions éthiques seulement nationales. Par ailleurs, il est clair qu’une liste nominative des handicaps justifiant un diagnostic anténatal serait incompatible avec les droits de l’homme. Enfin, pour exclure tout projet de convenance personnelle (à l’exception du choix du sexe), la solution pourrait être de tolérer l’analyse des chromosomes et d’autoriser la détection d’une seule anomalie génique - ce qui préserverait des dérives eugéniques.
Publication :Towards an efficient medical eugenics : Is the desirable always the feasible ? Hum. Reprod 1995 ; 10 : 3086-90 Jacques Testart et Bernard Sèle.

Nutrition à l'hôpital


 

Malnutrition et pathologies sont très souvent associées, surtout en milieu hospitalier. Face à cette réalité le service de diététique et l’unité de nutrition du CHU de Grenoble ont observé et analysé, pendant 4 semaines, 1460 plateaux repas de midi et du soir dans deux services pilotes  : l’orthopédie et la pneumologie.  
Aides-soignantes et diététiciennes ont participé au renseignement du questionnaire d’évaluation a posteriori du comportement alimentaire des patients. 

Caractéristiques de la population
La population moyenne obse-rvée est plus âgée que sur l’ensemble de l’hôpital. 
En pneumologie, le patient a, en général, plus de 60 ans et il présente une insuffisance respiratoire chronique. 
En orthopédie, deux profils types ont été dressés, celui de la femme âgée de plus de 70 ans avec une fracture du col du fémur et celui de l’homme de moins de 60 ans polyfracturé.
Intégrer davantage la fonction alimentaire dans une démarche de soins pluridisciplinaires
Il ressort de cette vaste étude que la composition des menus est encore trop calquée sur les apports proposés au sujet sain alors qu’il faudrait davantage tenir compte des tranches d’âge et des particularités du service considéré. Ainsi, il s’avère nécessaire d’augmenter la fréquence des aliments préférés : poisson, œufs et produits laitiers et de proposer davantage d’entrées. L’alimentation du sujet très âgé (plus de 80 ans) nécessite une attention particulière avec l’élaboration d’une formule simplifiée pour le dîner comportant un potage enrichi, des laitages et un dessert. D’autres pistes de travail sont aussi lancées notamment pour améliorer la gestion des repas et optimiser l’interrogatoire d’accueil. Il est également envisagé d’initier une politique de déstructuration des repas afin d’offrir au patient “ce qu’il veut quand il veut”. Un choix permanent de produits attractifs limiterait certains comportements anorexiques. Enfin, des propositions sont faites pour élargir la fonction des diététiciens et inciter le personnel à intégrer l’alimentation dans la fonction de soin.