Les caractéristiques de personnalité et les motivations des donneurs et donneuses de gamètes ont fait l’objet d’une étude menée de 2016 à 2018 à Toulouse par l’équipe d’accueil EA3694 de l’université – Paul Sabatier « Groupe de Recherche en Fertilité Humaine » et la Fédération française des CECOS*. Cette recherche originale s’intéresse aux candidats au don de gamètes, qu’ils soient femmes ou hommes, qu’ils aient eu préalablement des enfants ou pas. L’effectif important de volontaires renforce la pertinence des résultats de la recherche. Ainsi, lorsque la question de l’anonymat du don est posée aux hommes et aux femmes qui souhaitent donner leurs spermatozoïdes ou leurs ovocytes, la très grande majorité plébiscite le don anonyme.
Les résultats complets de l’étude seront disponibles dans quelques mois après avoir été soumis pour publication dans des journaux internationaux. Mais de façon anticipée, les premières réponses apportées par les 1 021 volontaires ont été analysées. Elles éclairent les débats en cours sur la révision de la loi de Bioéthique en apportant des données objectives sur la question de l’anonymat du don de gamètes.
En 2011, la loi de Bioéthique donne la possibilité à l’homme ou la femme n’ayant pas procréé de pouvoir faire un don de gamètes mais la mise en place de cette mesure ne s’est faite qu’en 2016. C’est dans ce contexte de changement que l’étude fut initiée. L’étude apporte un éclairage sur les questionnements liés à l’approche du don, ses représentations ainsi que les motivations et le profil des donneurs et donneuses. Les candidats au don de gamètes (hommes et femmes) se rendant dans les 20 CECOS participants ont été sollicités pour participer à l’étude. Il s’agissait de répondre à un questionnaire papier dans un premier temps (durée 20 min.) et de compléter ensuite un questionnaire en ligne permettant de définir les traits de la personnalité (durée 30-40min). 1 021 personnes se sont portées volontaires – 488 hommes et 533 femmes – pour participer à l’étude et ont complété le questionnaire papier. 512 avaient déjà au moins 1 enfant, 505 n’avaient pas d’enfant, pour 4 cette notion est manquante.
Anonymat du don de gamètes
A la question « selon vous, quel est le meilleur mode pour le don ? » : 93.7% des candidats au don ayant procréé et 92.6% de ceux n’ayant pas procréé sont tout à fait d’accord ou d’accord avec : « don anonyme ». 95% des candidats sont tout à fait d’accord ou d’accord avec : « don gratuit ».
A la question « seriez-vous toujours d’accord pour donner vos spermatozoïdes / ovocytes si la loi permettait à l’enfant conçu par don de connaître l’identité du donneur ? » : 47% des candidats au don ayant procréé et 54% des candidats n’ayant pas procréé sont plutôt d’accord ou tout à fait d’accord (différence significative entre les deux groupes).
A la question « pensez-vous qu’il est important pour l’enfant conçu par don d’avoir des informations non identifiantes sur le donneur ? » : Pour les candidats au don ayant procréé 30.6% répondent non, 40.6% oui et 28.8% ne savent pas. Pour les candidats au don n’ayant pas d’enfant 32.1% répondent non, 38.2% oui et 29.7% ne savent pas.
Un continuum de recherches pour éclairer le débat public
En 2006, une étude avait été menée dans 14 CECOS mais sur un effectif de seulement 193 donneurs de spermatozoïdes (Kunstmann et al.). 79.3% des hommes interrogés étaient également d’accord avec l’anonymat du don. En 2009, le groupe de recherche en psychologie sociale de l’université Lyon II (Kalampalikis et al.) avait mené une étude auprès de donneurs de spermatozoïdes au sein des CECOS : 49% affirmaient que le maintien de l’anonymat était indispensable, 42% se disaient partagés et interrogatifs et 9% seulement étaient favorables à la levée de l’anonymat. Dans l’étude actuelle et celle de 2006 les personnes ont été interrogées sur leur volonté de maintenir leur action de donner si la loi permettait la levée de l’anonymat du donneur. Lors de l’enquête de 2006, 37.8% des donneurs (de sperme) auraient toujours été d’accord pour donner alors qu’actuellement ce pourcentage est plus important : de 46 à 54% selon qu’ils aient ou non antérieurement procréé. Ce changement peut être probablement mis en rapport avec les débats et le retour des médias autour de l’anonymat. Par ailleurs, on peut noter que ceux qui ont des enfants sont moins enclins à maintenir leur action de don si la loi change que ceux qui n’ont pas d’enfants.
Au total, au moins la moitié des candidats au don ne le seraient plus si la loi supprime le strict anonymat. Enfin, en ce qui concerne la transmission de données non identifiantes à l’enfant, 60.1% des donneurs en étaient d’accord en 2006 contre environ 40% actuellement. Le pourcentage d’indécis est plus important actuellement.
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*L’étude prospective et multicentrique nationale, intitulée «Motivations et aspects psychologiques du don de gamètes » a impliqué 20 CECOS (Centres d’Etude et de Conservation des Oeufs et du Sperme humains) répartis sur le territoire métropolitain.
Correspondance, informations : Louis BUJAN, professeur de médecine de la reproduction, directeur du groupe de recherche EA 3694, et Mme Nadjet NOURI-GENOLHAC psychologue-clinicienne, coordonnateurs de la recherche.
Centres CECOS impliqués dans l’étude : Amiens, Besançon, Bordeaux, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nice, Paris : Cochin, Tenon, Jean Verdier, Reims, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse et Tours.