Cancer de la prostate aux Antilles : l’Ablatherm, nouvelle arme du CHU

En décembre 2004 le CHU avait loué un Ablatherm pour évaluer les possibilités d'implantation de cet appareil de façon définitive. 20 patients avaient pu bénéficier avec succès du traitement par ultrasons focalisés de haute intensité. L'acquisition de l'Ablatherm, validée par les instances en mai 2005 et avec le soutien de l'ARH, s'est concrétisée en septembre 2005.

En décembre 2004 le CHU avait loué un Ablatherm pour évaluer les possibilités d’implantation de cet appareil de façon définitive. 20 patients avaient pu bénéficier avec succès du traitement par ultrasons focalisés de haute intensité. L’acquisition de l’Ablatherm, validée par les instances en mai 2005 et avec le soutien de l’ARH, s’est concrétisée en septembre 2005.

Les premiers traitements ont débuté, le 20 septembre 2005, sous la responsabilité du Pr. Blanchet, chef de service en Urologie au CHU de Pointe-à-Pitre. L’acquisition de ce traitement innovant par le CHU, limitant la morbidité sans obérer le contrôle de la maladie tumorale, enrichit donc considérablement l’offre de soins aux Antilles Guyane et dans la Caraïbe pour le cancer de la prostate, première cause de décès par cancer dans notre région.

Epidémiologie du cancer de la prostate
En Guadeloupe et en Martinique, le cancer de la prostate est la pathologie tumorale la plus fréquente et la première cause de mortalité par cancer. La Guadeloupe comme la Martinique présentent l’une des incidences les plus élevées au monde de cancer de la prostate en liaison vraisemblable avec les origines africaines de la population. En 2004, 427 nouveaux cas de cancer de la prostate ont été diagnostiqués dans le département. Cela représente une incidence (standardisée à l’âge de la population mondiale) de 169 pour 100 000. En 2004, 100 patients sont décédés d’un cancer de la prostate soit une surmortalité double de celle des autres régions françaises.
Le vieillissement de la population ainsi que le développement du diagnostic précoce contribuent à l’augmentation de l’incidence observée depuis plusieurs décennies dans l’ensemble des pays du monde.
L’incidence du cancer de la prostate présente une grande variabilité, d’un facteur de 1 à 30, en fonction des zones géographiques et des caractéristiques ethniques des populations. C’est ainsi que l’incidence la plus élevée est retrouvée chez les populations noire-américaines et caribéennes et la plus faible chez les populations asiatiques. Les populations blanche-américaines, européennes et sud-américaines se situant en position intermédiaire .
Cette forte disparité géographique et ethnique dans l’incidence soutient la présence de facteurs génétiques, idée renforcée par l’existence de formes familiales ou héréditaires. Cependant, des modifications significatives de l’incidence lors des flux migratoires, comme par exemple l’augmentation de l’incidence chez les populations asiatiques récemment émigrés aux USA, suggère fortement la présence de facteurs environnementaux.

Les principaux facteurs de risque sont l’âge (rare avant l’âge de 45 ans, le cancer de la prostate voit son incidence augmenter rapidement à partir de la 6ème décennie.), l’origine ethnique et les antécédents familiaux
L’espérance de vie augmentant, une recrudescence du nombre de cancer de la prostate est attendue. Suite aux recommandations de l’association française d’urologie, l’âge au diagnostic est de plus en plus jeune et le stade au diagnostic se modifie avec plus de 70% de tumeurs révélées à un stade précoce (localisé curable, ou localement avancé).
Les systèmes de santé sont dès maintenant confrontés à un afflux de patients dont 2 groupes se démarquent. D’une part des hommes jeunes qui attendent un traitement à la fois curateur sur le long terme avec une moindre morbidité. D’autre part une population vieillissante dont l’espérance de vie reste non négligeable et pour laquelle les traitements de référence actuels présentent également des risques de complications trop importants mais qui cependant n’acceptent plus une simple surveillance de leur pathologie. Le dépistage du cancer de la prostate permet une prise en charge thérapeutique efficace avec des traitements de référence.

A ce jour, ces traitements de référence du cancer de la prostate au stade localisé sont la prostatectomie radicale incisionnelle ou coelioscopique, et la radiothérapie externe. Un traitement optionnel est la curiethérapie. Les complications de ces traitements de référence sont connues, et acceptées en regard du bénéfice attendu pour les patients. Les études de qualité de vie des patients entre prostatectomie, radiothérapie et curiethérapie montrent des impacts différents mais des résultats globalement identiques en terme de qualité de vie.

Une innovation thérapeutique : les ultrasons focalisés de haute intensité
Les ultrasons focalisés (ondes acoustiques identiques à celles de la voix mais de fréquence ici 100 fois plus élevée) ont été développés il y a plus de 12 ans pour une application humaine. Il s’agit d’un traitement physique qui porte la température des tissus à plus de 85°C et les détruit de façon irréversible. Il n’y a pas de rayonnement ni d’effet retardé. Une nécrose de coagulation se forme immédiatement et évolue vers une résorption cicatricielle.

Déroulement d’une séance de traitement
Le traitement est effectué au bloc opératoire par un urologue. L’appareil utilisé en France est l’Ablatherm, qui a obtenu le marquage CE en 2000. La sonde émettrice d’ultrasons est introduite au contact de la prostate repérée en échographie. Sous contrôle échographique permanent l’opérateur choisit la taille et l’organisation spatiale des volumes successivement traités. Le traitement se déroule donc en une séance pour un volume de prostate en règle inférieur à 40 cm3. La séance dure de 1h30 à 3h00 selon le volume prostatique. La particularité de ce traitement est de pouvoir être répété, à plusieurs mois d’intervalle. Il n’y a pas de dose cumulée sur les tissus, comme pour les radiations ionisantes. De même il est possible d’appliquer ce traitement sur une prostate déjà irradiée si une récidive localisée est prouvée.

Résultats en clinique humaine
Pour les patients présentant un cancer localisé de la prostate, traités par Ablatherm® en première intention en utilisant les paramètres techniques standards et ayant un recul suffisant, on a observé 80.8% de patients présentant tous les critères de guérison.

L’objectif du traitement du cancer de la prostate par ultrasons focalisés est de proposer aux patients non candidats à la chirurgie (ou la refusant) un traitement peu invasif et bien toléré, a priori avec une efficacité équivalente.
Le traitement par HIFU a démontré, avec un recul encore insuffisant pour extrapoler pleinement les conclusions des premières études, une efficacité certaine dans le cancer localisé de la prostate et constitue l’une des options thérapeutiques retenues dans certaines situations.
Etant donné l’absence de recul sur la survie globale à long terme du traitement par HIFU dans le cancer de la prostate, les indications doivent être actuellement posées dans un cadre très strict.

Indications thérapeutiques
La tumeur doit être localisée avec un volume prostatique inférieur à 50 cm3 chez un patient non candidat à la prostatectomie totale du fait de son âge, de pathologies associées, de l’obésité. Une espérance de vie d’environ 10 ans est requise pour justifier un traitement.

Les études médico-économiques indiquent que la prise en charge pour un traitement par ultrasons focalisés de haute intensité semble s’effectuer à un coût moindre que celui des autres options thérapeutiques.

D’après un article du Pr Pascal Blanchet, Chef de service d’Urologie.

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