CAR T-CELLS: à Besançon, une nouvelle immunothérapie pour combattre le cancer du sang et de la moelle

Des chercheurs de l’Etablissement français du sang ont intégralement conçu, en collaboration avec le service d’hématologie du CHU de Besançon, la première immunothérapie cellulaire ciblant IL1-RAP. L’efficacité démontrée de ce CAR T-cells «made in Franche-Comté» ouvre la possibilité de guérir la leucémie myéloïde chronique, ainsi que d’autres hémopathies. Des des résultats obtenus dans le cadre de l’unité mixte de recherche Inserm EFS de l’université de Franche-Comté* et publiés en janvier 2019 dans la revue américaine Cancer Research.

Des chercheurs de l’Etablissement français du sang ont intégralement conçu, en collaboration avec le service d’hématologie du CHU de Besançon, la première immunothérapie cellulaire ciblant IL1-RAP. L’efficacité démontrée de ce CAR T-cells «made in Franche-Comté» ouvre la possibilité de guérir la leucémie myéloïde chronique, ainsi que d’autres hémopathies. Des des résultats obtenus dans le cadre de l’unité mixte de recherche Inserm EFS de l’université de Franche-Comté* et publiés en janvier 2019 dans la revue américaine Cancer Research. 
La leucémie myéloïde chronique (LMC) est un cancer rare du sang et de la moelle (environ 600 nouveaux cas par an)  dont les premiers symptômes sont notamment la fatigue, la survenue de saignements, des douleurs ou une gêne abdominale.
Actuellement, le traitement standard de ces leucémies repose sur des inhibiteurs de tyrosine kinase. Ces traitements de thérapie ciblée «contiennent» la maladie sans toutefois la guérir, imposant aux patients en rémission un traitement à vie, non dépourvu d’effets secondaires. Certaines personnes se révèlent toutefois réfractaires au traitement et connaissent malgré ceux-ci une progression de la maladie.
Pour comprendre cette «résistance», des études ont été menées et ont mis en évidence l’existence d’une protéine IL1-RAP, fortement exprimée par les cellules leucémiques. Ces cellules leucémiques, insensibles aux traitements inhibiteurs de tyrosine kinase sont en partie à l’origine des rechutes en cas d’arrêt ou d’intolérance au traitement.

L’emploi des CAR T-cells ouvre les perspectives de guérison

Le Dr Fabrice Larosa, hématologue au CHU de Besançon, clinicien référent de la LMC et allogreffeur, s’est associé aux Drs Christophe Ferrand et Marina Deschamps, chercheurs à l’Etablissement français du sang. Avec leurs collaborateurs, dont le Dr Walid Warda, dans le cadre de son doctorat, ils ont axé leurs recherches sur la guérison de la LMC, et non sa rémission, espérant à terme pouvoir s’affranchir des traitements par inhibiteurs de tyrosine kinase. Pour cela, ils ont ciblé la protéine IL1-RAP en recourant à l’immunothérapie par CAR T-cells.
Les CAR T-cells sont des médicaments de thérapie innovante, élaborés à partir de composants du vivant. Des lymphocytes T sont prélevés au patient et génétiquement modifiés en laboratoire: grâce à la thérapie cellulaire et génique, ils sont dotés de récepteurs CAR (pour Chimeric Antigen Receptor) qui les guident précisément vers les cellules cancéreuses afin de les détruire.

Une publication dans Cancer Research et le dépôt d’un brevet

Les chercheurs bisontins ont donc construit et validé de nouveaux récepteurs CAR afin d’en doter les lymphocytes T, pour générer des CAR T-cells propres au patient et ciblant la protéine IL1-RAP. Ils ont pour cela produit un anticorps monoclonal anti-IL1-RAP, à partir duquel ils ont pu construire le récepteur chimérique CAR. Ils ont démontré que les lymphocytes T, armés de leur nouveau récepteur CAR, étaient capables in vitro de tuer les cellules leucémiques de patients, et d’éliminer in vivo des tumeurs implantées dans des souris humanisées. Ils ont montré également une toxicité réduite sur les tissus sains et sur les mécanismes impliqués dans la production des diverses cellules sanguines (hématopoïèse). Enfin, les chercheurs ont doté le CAR T-cells d’un gène suicide (interrupteur « on-off »), permettant d’éliminer les cellules médicaments en cas de complications.
La preuve de l’efficacité de cette approche d’immunothérapie originale utilisant des lymphocytes T pour cibler IL-1RAP a été établie en laboratoire et a fait l’objet d’une publication, en janvier 2019, dans la prestigieuse revue scientifique américaine Cancer Research. Un brevet international a également été déposé.

Un espoir pour les patients réfractaires ou intolérants au traitement actuel

Un médicament de thérapie innovante pourrait naître de ces travaux, concernant en premier lieu les patients réfractaires ou intolérants aux traitements habituellement prescrits. Plus largement, il pourrait remplacer le traitement par inhibiteurs de tyrosine kinase, éradiquer la source de la maladie et guérir le patient. Ces CAR T-cells ciblant IL-1RAP se révèleront sans doute aussi pertinents pour le traitement d’autres hémopathies. Les chercheurs poursuivent leurs investigations en ce sens.

Besançon au carrefour des approches d’immunothérapie innovantes

A Besançon, plusieurs éléments contribuent à créer un environnement particulièrement propice au développement de ces approches d’immunothérapie cellulaire innovante. A commencer par l’expérience historique en thérapie génique de l’équipe Inserm UMR 1098. En effet toujours en collaboration avec le CHU, ces mêmes chercheurs ont ouvert un essai clinique de phase I («Side by CIDe»), utilisant des lymphocytes T du donneur, dans le cadre de l’allogreffe de moelle osseuse, permettant de s’affranchir des traitements  lourds et préventifs des complications post-greffe. A cet expertise, s’ajoute le fait que le service d’hématologie du CHU bénéficie de l’accréditation JACIE.
Besançon dispose pour le reste d’un environnement technologique, scientifique et industriel de premier plan, avec en particulier une plateforme de préparation de médicaments de thérapie innovante de l’EFS-BFC, l’une des rares plateformes académiques françaises du réseau EFS répondant aux normes européennes pour la fabrication de tels médicaments. L’un des moteurs dans ce contexte reste le partenariat étroit qui associe le CHU de Besançon, l’EFS-BFC à l’université de Franche-Comté.

*UMR 1098 Inserm–EFS: Interactions hôte-greffon-tumeur & ingénierie cellulaire et génique

Commentaires

Il n’y a pas encore de commentaire pour cet article.

Sur le même sujet

Première greffe française de larynx : récit d’une performance lyonnaise

Pour la première fois en France, un larynx a été greffé sur une femme les 2 et 3 septembre dernier. Deux mois et demi après cette opération spectaculaire qui a mobilisé douze chirurgiens issus des Hospices Civils de Lyon et autres CHU français durant vingt-sept heures, le CHU lyonnais communique sur le sujet. Quant à la patiente âgée de 49 ans, elle pourrait retrouver durablement l’usage de la parole vingt ans après l’avoir perdue.

Etudes de Médecine : Romuald Blancard ou l’un des visages de l’ouverture du 2e cycle à la Réunion

Depuis septembre, il fait partie de la première promotion d’étudiants en médecine de quatrième année de La Réunion. Pour Réseau CHU, Romuald Blancard a accepté de nous parler de l’ouverture du deuxième cycle des études médicales sur son île, mais pas seulement. Son parcours atypique, son stage en psychiatrie, ses rêves jamais trop grands etc. ont été abordés dans les locaux du nouveau campus bioclimatique de Sainte-Terre. Sans langue de bois.

Le CHU de La Réunion a pris la vague rose

La seizième édition de la Run Odysséa Réunion s’est tenue les 4 et 5 novembre sur le site de l’Étang-salé, dans l’ouest de la Réunion, et ce malgré une météo capricieuse qui a bien failli compromettre l’opération. 275 000 euros ont été récoltés. Un succès auquel est associé le CHU de la Réunion, partenaire pour la première fois cette année, et dont le baptême de l’eau a été placé sous le signe de la prévention. Reportage.

A Nancy, l’Infiny au service des MICI

En juin 2021, l’Agence nationale de la recherche annonçait le financement de douze nouveaux Instituts hospitalo-universitaires, montant ainsi le nombre d’IHU à dix-neuf avec l’ambition de faire de la France la première nation souveraine en matière de santé à l’échelle européenne. Sur ces douze nouveaux établissements, deux d’entre eux ont obtenu, en raison de “intérêt de santé publique majeur” qu’ils présentaient, le label “IHU émergent ».” C’est notamment le cas de l’IHU INFINY du CHRU de Nancy, officiellement lancé le 7 septembre dernier, et spécialisé dans la prise en charge des MICI.