Les Assises nationales hospitalo-universitaires, qui constituent un moment de réflexion et de proposition important pour les CHU, se sont tenues à Lille les 9 et 10 décembre dernier. Organisée par la Conférence des présidents de CME de CHU, cette dix-septième édition avait pour fil directeur l’incertitude. Un thème choisi avant la crise du COVID mais qui reste plus que jamais d’actualité. Réseau CHU vous propose de (re)découvrir quelques moments forts de ces deux jours en images et en vidéo.
1/11 : Lille succède à Poitiers
Après Toulouse en 2016 et Poitiers en 2018, les 17e Assises hospitalo-universitaires se sont tenues la semaine dernière au Grand Palais de Lille. Organisée par la Conférence des présidents de CME, en concertation avec celles des directeurs généraux de CHU et des doyens de facultés de médecine (elles-mêmes en lien avec les conférences de doyens de facultés de pharmacie, d’odontologie et des présidents d’université), cette édition 2021 a pris le parti d’aborder et de décliner le thème de l’incertitude sur deux jours.
2/11 : Le discours d’allocution de François-René Pruvot
Le Pr François-René Pruvot, Président de la Commission des présidents de CME, a prononcé l’une des allocutions qui ont lancé ces Assises. Entamant son discours par ces mots : « Nos connaissances progressent et les questions qui se posent à la frontière de nos acquis sont parfois sans réponse, ou avec des réponses temporaires ou des réponses fausses. », il a ensuite évoqué le malaise que traverse le milieu hospitalo-universitaire – imputable selon lui à une vision trop systémique de la santé, à la difficile appréhension du ressenti psychique de l’opinion publique, et à une cristallisation des positions, notamment avec une jeune génération aux aspirations et à la vision du métier différentes. François-René Pruvot a achevé sa prise de parole en invoquant l’idée que le risque fait partie de la pratique, et ce dans un monde où cette notion est de moins en moins acceptée voire rejetée en bloc.
3/11 : Incertitudes financières
Pour les CHU, l’incertitude possède bien des visages. Après une présentation dédiée à la question de la démographie des professionnels de santé et à son évolution dans le futur, ce sont les incertitudes financières qui se sont retrouvées au centre du débat. Une table ronde co-animée par Véronique Anatole-Touzet, Directrice Générale du CHU de Rennes.
4/11 : Incertitudes macroéconomiques VS lisibilité financière
Pour en parler, Frédéric Varnier, Directeur Général du CHU de Caen avait fait le déplacement. De l’autre côté de l’écran géant, se tient Amélie Verdier, Directrice générale de l’ARS Île-de-France. C’est en effet à distance que l’ancienne secrétaire générale de l’APHAP (2014-2016) et ex-directrice du budget au ministère de l’économie et des finances (2017-2021) a exposé ce qui relève, selon elle, d’un véritable paradoxe budgétaire : avec d’un côté, des « incertitudes fortes au plan macroéconomique » (effondrement de la croissance en 2020, une inflation dont il est difficile de prévoir la durée), et de l’autre, une « lisibilité financière donnée aux CHU qui n’a peut-être jamais été aussi forte. »
5/11 : « Travailler à une vraie déontologie de la communication scientifique »
Le public avait quitté la salle Pasteur sur le thème de l’instabilité règlementaire et juridique en santé. De retour de la pause du déjeuner, il l’a retrouvée sur tout autre sujet : « Incertitudes scientifiques et technologiques de la recherche ». Autour de la table, le Pr Didier Samuel, Doyen de la faculté de médecine Paris Sud, Président du CNCR, et Gilles Bloch, Président de l’Inserm. On retiendra de cet échange passionnant un postulat en guise de préambule : « En recherche l’incertitude est très importante, car sans elle on ne cherche pas » ; une remarque : « Cette crise du Covid a montré une vision de la recherche qui peut être démentie à tout moment. Or les CHU doivent en même temps rassurer car ils prennent en charge. » ; un appel à aller plus loin dans la vulgarisation et la communication : « Notre rôle est d’expliquer, partout, dans les médias, dans les classes d’école. (…) Il faut travailler à avoir une vraie déontologie de la communication scientifique. Pour pouvoir aussi identifier une faute professionnelle. » Passionnant on vous dit.
6/11 : L’incertitude, cet allié insoupçonné
De la recherche à l’enseignement, il n’y a qu’un pas. Et dans ce dernier cadre, l’incertitude peut s’avérer être une véritable composante de la formation. C’est un peu ce qu’est venu expliquer Pierre Chainais, Professeur à Centrale et spécialiste de l’Intelligence Artificielle. Difficile mission que de restituer ici l’exposé. Toutefois, si l’on devait le résumer, nous garderions probablement cette phrase : « L’aléa n’est pas un ennemi, il peut être un allié (…) l’intelligence artificielle s’intéresse aux systèmes incertains. »
7/11 : Dompter l’incertitude par l’apprentissage
Le rythme des présentations ne faiblit pas. Arrive justement celle du Pr Christine Ammirati, conseillère santé au ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, consacrée à l’incertitude cognitive. Quels sont les mécanismes de la décision ? Comment raisonne-t-on pour décider ? Comment apprendre à décider dans l’incertitude ? Telles sont les questions qui ont été lancées depuis l’estrade pour se diffuser dans les esprits. Pour Christine Ammirati, une partie de la réponse se trouve dans notre capacité à nous confronter à des expériences dynamiques et complexes, à s’entraîner à la flexibilité et à la collaboration. Et de reprendre les mots du chercheur Patrick Lagadec pour mieux conclure : « Il ne s’agit pas de prévoir l’imprévisible mais de s’entraîner à lui faire face. » Cela fait deux ans que nous travaillons ensemble [cf crise sanitaire] ; ce « ensemble » est quand même ce qui compte le plus pour pouvoir raisonner dans l’incertitude.»
8/11 : Le conseil scientifique vu de l’intérieur
Après chercher et enseigner, « Soigner en pilotant l’incertitude » était le troisième et dernier chapitre de cette première journée. Pour nourrir cette discussion, plusieurs personnalités désormais connues des Français, dont Jean-François Delfraissy, à la tête du Conseil scientifique auprès de l’Elysée. Avec son collègue Bruno Lina, le Pr Delfraissy est revenu sur les vingt-et-un mois de crise qui viennent de s’écouler. L’assistance aura notamment appris qu’après deux cent soixante-cinq réunions tenues, cinquante avis rendus, vingt-cinq notes d’alerte rédigées, et malgré quelques moments de tensions, « le conseil scientifique reste un groupe uni ». Aussi, si l’interaction scientifiques-politiques s’est globalement déroulée dans un climat de confiance et de respect, s’accordant sur de nombreux points (notamment le passe sanitaire), Jean-François Delfraissy a regretté qu’un comité citoyen n’ait pas été associé dès le départ aux discussions. Une « erreur », juge-t-il aujourd’hui.
9/11 : « Depuis deux ans, on a réappris à agir face aux drames annoncés »
La dernière table ronde de la journée (Faire face : comment ?) aura permis de croiser plusieurs témoignages de représentants des CHU, dont ceux du Pr Olivier Claris (HCL) et de François Crémieux, ancien adjoint de Martin Hirsch (APHP), récemment descendu à Marseille pour diriger l’APHM. « Notre société était l’une des moins préparées à cet événement, là où beaucoup de communautés humaines connaissent des situations de guerre, etc. Depuis deux ans, on a réappris à agir face aux drames annoncés. », a notamment dit François Crémieux, qui s’est aussi exprimé sur le débat actuel COVID/T2A. Son avis est plutôt tranché : « C’est consternant. On ne peut pas analyser les enjeux des crises actuelles avec nos outils d’hier. » Et d’ajouter, pour prolonger : « Il faudrait que l’on retienne les enseignements de ce que l’événement nous a dit de notre système, et non pas ce qu’il est venu confirmer ou infirmer de ce que l’on pensait avant.»
10/11 : Le CHU, modèle de modernité et d’excellence selon Olivier Véran
Vendredi 10 décembre, le ministre de la santé et des solidarités Olivier Véran s’est présenté dès 8h50 pour s’adresser à la communauté hospitalo-universitaire. S’il a rapidement déclaré ne pas « éluder les difficultés » que traverse l’hôpital public, amplifiées par une crise sanitaire agissant comme une « goutte d’eau dans un vase qui s’était rempli depuis des décennies », Olivier Véran a écarté toute remise en cause du modèle des CHU de 1958. Au contraire, ces derniers restent à ses yeux « un outil puissamment moderne, flexible et réactif ».
10/11 : La vidéo des Assises 2021
Adrien Morcuende