« La mobilisation générale autour de l’importance du don est à partager »

L’Agence de la biomédecine a la responsabilité d’organiser le prélèvement et les greffes de moelle osseuse, également appelées greffes de cellules souches hématopoïétiques. L’Agence gère également le registre national des donneurs de moelle osseuse. Le Dr Evelyne Marry, directrice du prélèvement et des greffes de cellules souches hématopoïétiques à l’Agence de la biomédecine, détaille les enjeux de la greffe et appelle à renforcer la collaboration avec les hôpitaux.
L’Agence de la biomédecine a la responsabilité d’organiser le prélèvement et les greffes de moelle osseuse, également appelées greffes de cellules souches hématopoïétiques. L’Agence gère également le registre national des donneurs de moelle osseuse. Le Dr Evelyne Marry, directrice du prélèvement et des greffes de cellules souches hématopoïétiques à l’Agence de la biomédecine, détaille les enjeux de la greffe et appelle à renforcer la collaboration avec les hôpitaux.
L’Agence de la biomédecine souhaite sensibiliser le grand public sur l’importance du don de moelle osseuse. Pour quelles raisons ?
Lorsqu’un patient souffre d’une maladie grave du sang pour laquelle une indication de greffe est posée, le médecin recherche d’abord un donneur au sein de la famille, en commençant par les frères et sœurs qui ont les mêmes parents que le patient. C’est ce que nous appelons le « donneur intra-familial compatible ». S’il n’existe pas ou si le typage HLA (1) de la fratrie ne permet pas de procéder à la greffe, nous effectuons une recherche dans le registre des donneurs volontaires de moelle osseuse géré par l’Agence. La France compte plus de 280 000 donneurs et nous avons également accès à 73 registres dans le monde, lesquelles regroupent 31 millions de personnes prêtes à réaliser des tests supplémentaires et à donner leur moelle osseuse. Le patient possède une chance sur quatre de trouver un donneur dans la fratrie. Dans les autres cas, il existe une chance sur un million en moyenne de trouver un donneur en dehors de sa famille d’où l’intérêt de développer ces registres pour aider les patients à bénéficier d’une greffe. 
Combien de greffes de moelle osseuse sont-elles réalisées chaque année ?
En comptabilisant le nombre de donneurs au sein des fratries et le nombre de donneurs non apparentés compatibles, 1.700 patients bénéficient chaque année d’une greffe en France. Un peu plus de 60% des patients ayant besoin d’une greffe l’obtiennent. Pour ceux qui n’y ont pas accès, les raisons peuvent être liées à une absence de donneurs, mais aussi à une évolution de la maladie car n’oublions pas que l’état clinique du patient doit permettre la greffe. Jusqu’en 2021, notre stratégie consiste à inscrire chaque année 20.000 nouveaux donneurs et ce, pour plusieurs raisons : nous devons prendre en considération la limite d’âge (les donneurs doivent être âgés de 18 à 50 ans pour s’inscrire et ils sont comptabilisés jusque 60 ans) ou encore le choix de sortir du dispositif pour une raison personnelle ou un problème médical. Entre 6.000 et 7.000 personnes sortent du registre annuellement. Nous devons non seulement les remplacer mais faire aussi en sorte que ce registre se développe. Notons que tous les ans, un million de donneurs enrichissent la base mondiale. 
Existe-t-il plusieurs types de greffe ?
Il existe des greffes alternatives de trois ordres. Premièrement, les greffons peuvent provenir d’un donneur non parfaitement compatible. Nous pouvons en effet nous autoriser une petite différence HLA. Ensuite, nous pouvons recourir à des greffes de sang placentaires qui sont prélevées à la naissance des enfants avec le consentement des parents. Ces greffons, peu riches, sont constitués de cellules immatures, capables de s’approprier l’environnement dans lequel elles se trouvent, ce qui réduit fortement les réactions immunologiques majeures. Enfin, nous assistons au développement des greffes haplo-identiques – autrement dit semi-identiques -, le prélèvement ayant été opéré chez des donneurs intra-familiaux. Après cinq ans de pratique, des études sont en cours pour définir leur place et savoir si elles pourront demain remplacer d’autres formes de greffe. Près de 350 greffes haplo-identiques ont été recensées l’an dernier.
Quel message adresseriez-vous aux hôpitaux ? 
J’aimerais d’abord rendre hommage aux 37 services d’allogreffe dans les CHU. Il s’agit de services hyper pointus qui disposent d’une habilitation délivrée par les agences régionales de santé pour réaliser des allogreffes de donneurs, apparentés ou non.
Nous organisons tous les ans une semaine nationale de mobilisation en faveur du don de moelle osseuse. Les hôpitaux de ces 37 services nous accompagnent dans la diffusion de l’information, sous forme d’affichage notamment. Les médecins greffeurs sont très partie prenante. Il y a peut-être des actions à approfondir pour aider toujours plus efficacement les patients. Nous avons tous le même objectif : trouver des donneurs pour les patients. Nous aimerions par exemple sensibiliser davantage les proches des patients qui ont besoin d’une greffe. Nombre de ces personnes ne sont pas retenues parce que la compatibilité est insuffisante par exemple, ce qui crée souvent beaucoup de déception et de frustration. Or nous pourrions leur offrir une perspective positive en leur proposant de s’inscrire sur le registre des donneurs afin d’aider d’autres malades. Nous pourrions nous appuyer sur les hôpitaux et particulièrement les infirmiers de coordination en greffe pour positiver les démarches réalisées auprès des familles.
1 – Le typage HLA permet d’identifier les antigènes d’un individu et donc de s’assurer de la compatibilité tissulaire avant une greffe.

 

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