L’accueil des femmes victimes de violence

La violence exercée, sous quelque forme que ce soit, à l'encontre des femmes reste une réalité dramatique à laquelle sont confrontés les services de première ligne dans les établissements hospitaliers. La prévention et l'information restent plus que jamais nécessaires et la ville de Nancy accueille un colloque sur le thème des « Violences faites au femmes ». Organisé à l'initiative de « Gynécologie sans frontière », il traite le sujet dans sa globalité, jusqu'aux mutilations sexuelles, en parallèle de la journée nationale de prévention début février et du thème des violences faites aux femmes décrété Grande Cause Nationale 2010.

La violence exercée, sous quelque forme que ce soit, à l’encontre des femmes reste une réalité dramatique à laquelle sont confrontés les services de première ligne dans les établissements hospitaliers. La prévention et l’information restent plus que jamais nécessaires et la ville de Nancy accueille un colloque sur le thème des «Violences faites au femmes». Organisé à l’initiative de «Gynécologie sans frontière», il traite toutes les formes d’agression jusqu’aux mutilations sexuelles. Cette rencontre fait écho à la journée nationale de prévention début février et renvoie aussi à la Grande Cause Nationale 2010 que sont les violences faites aux femmes.

A l’instar des autres territoires, le Pôle régional d’Accueil des Victimes d’Agressions sexuelles est la référence en Lorraine. Situé à la Maternité Régionale (indépendante du CHU) il est coordonné par le Dr Frédérique Guillet-May, gynécologue obstétrique et travaille en étroite collaboration avec les services des urgences adultes et enfants du CHU de Nancy et l’Unité d’Accueil d’Urgences Psychiatriques. Explications sur une organisation où cohabitent deux institutions : la médecine et la justice.

C’est en 1997 que ce Pôle régional d’Accueil des Victimes d’Agressions sexuelles a vu le jour avec le concours du Parquet de Nancy et à l’initiative des autorités de tutelle. Depuis, une réunion annuelle rassemble les partenaires médicaux, judiciaires et associatifs afin d’améliorer des dispositifs d’accueil qui doivent répondre à la fois aux exigences de la loi et aux attentes des victimes. La distinction entre « violences conjugales » c’est-à-dire les coups et les blessures volontaires envers les femmes ou les hommes et « violences sexuelles », dont le viol, est faite par la justice. Cependant, cette approche induit deux circuits différents pour les femmes en recherche de soins, de protection et qui souhaitent porter plainte.

Les urgences adultes et l’Unité Médico-Judiciaire du CHU, situées à l’hôpital Central, accueillent les victimes de « violences conjugales » et les hommes victimes de violences sexuelles. Elles y sont prises en charge sur le plan médical, psychologique et médico-légal. «Un certificat ou un rapport de réquisition décrivant les blessures est établi par un médecin légiste» explique le Dr Laurent Martrille du CHU. «Cette démarche se fait, soit à la demande d’un Procureur de la République ou d’un Officier de Police Judiciaire, soit à la demande individuelle de la victime. La formation en médecine légale permet à un praticien d’être spécialisé dans la description et l’interprétation des blessures et dans la prise en charge des victimes.» Le rôle des établissements de santé est de proposer un accueil par le service social et l’orientation systématique vers des associations spécialisées.

La Maternité Régionale de Nancy accueille de son côté les femmes victimes de « violences sexuelles ». Là aussi elles bénéficient d’une prise en charge thérapeutique (recherche IST, prévention de grossesse, traitement antalgique et/ou anxiolytique) et se voient proposer un soutien psychologique. Dans le même temps, et sur réquisition du Parquet ou suite à une démarche individuelle, une procédure très stricte est appliquée qui relève d’un protocole mis en place avec les autorités judiciaires : recueil d’informations sur les faits, rassemblement de preuves et certificat médico-légal.

«En 2009, l’équipe du pôle, dont tous les membres sont spécialement formés, a reçu 80 victimes. Parmi elles, plus de 45% d’adolescentes entre 12 et 18 ans et 30% étaient sous emprise de l’alcool» précise le Dr Guillet-May de la Maternité. «Aujourd’hui, les viols interviennent souvent au cours de ces soirées où les ados se mettent en « transgression », les agressions dans les rues sont minoritaires.» Si les moeurs évoluent la loi aussi. Ainsi, il est admis depuis 2007, que le mariage, le concubinage, le PACS ou l’agression sous l’emprise de l’alcool sont des circonstances aggravantes en cas de viol avéré. De même, il est d’emblée conseillé à toute victime de porter plainte auprès d’un commissariat ou d’une gendarmerie : il faut savoir que les officiers de police judiciaire se doivent d’enregistrer tout dépôt de plainte, même si la victime n’a pas de certificat.

En revanche ce qui perdure au-delà des époques et des circonstances ce sont les conséquences psychologiques sur les victimes d’agressions. Ainsi la Maternité propose-t-elle systématiquement une visite 6 semaines après les faits. « C’est l’occasion de faire le point sur ce qui s’est passé et en particulier de déceler d’éventuels comportements post traumatiques en particulier » précise la gynécologue, « le docteur Catherine Pichené et son équipe de victimologie nous ont sensibilisés aux conséquences possibles du viol : reviviscence des faits, troubles du sommeil, douleurs psychosomatiques, tentatives de suicide, anorexie et boulimie, etc. »

Un constat partagé par le docteur Pierrette Witkowski du service Psychiatrie et Psychologie clinique du CHU qui participe également au colloque : « Il faut comprendre que les victimes se trouvent dépassées par ce qu’elles ont subi. La violence les nie dans leur intégrité physique et psychique aussi. Leurs défenses s’effondrent et les auto-culpabilisations du genre « c’est ma faute car je l’ai provoqué » ou « je n’avais qu’à pas être là à ce moment-là » ne sont ni plus ni moins que la tentative inconsciente du sujet de retrouver une maîtrise de sa destinée ! »

Il faut savoir qu’une des premières étapes de la reconstruction passe par le dépôt de plainte. Pour être efficace la prise en charge des femmes victimes de violences requiert des compétences, des qualités humaines et techniques ainsi qu’une collaboration multidisciplinaire. La réponse aux attentes en matière de soins et d’orientation doit s’accompagner d’une disponibilité constante de spécialistes pour faire face aux diverses urgences. C’est en ce sens que le Dr Laurent Martrille réfléchit, en collaboration étroite avec le Pôle régional, à une nouvelle organisation du réseau : « Pourquoi ne pas s’orienter vers la création d’une « Unité de victimologie » qui pourrait rassembler tous les professionnels liés par la prise en charge des victimes de violences ? » Oui, pourquoi ?

Coordonnées
Pôle régional d’accueil des victimes d’agressions sexuelles : Maternité régionale, 10 rue du Docteur Heydenrich, Nancy. Tél : 03 83 34 36 90
Et le site Internet national http://stop-violences-femmes.gouv.fr

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