Mise à plat de la formation des médecins et premières recommandations

La 1ère édition des Etats Généraux de la Formation Médicale qui s’est tenue les 8 et 9 décembre 2011, a permis à la Conférence des Doyens, présidée par le Pr Patrice Deteix, de jeter les bases d’une refondation de la formation initiale des médecins. L’enjeu est de taille : 3 ans après la dernière réforme des études, de nouvelles évolutions s’imposent afin d’adapter l’enseignement médical à l’augmentation du numerus clausus, à la lutte contre la «désertification médicale»...

La 1ère édition des Etats Généraux de la Formation Médicale qui s’est tenue les 8 et 9 décembre 2011, a permis à la Conférence des Doyens, présidée par le Pr Patrice Deteix, de jeter les bases d’une refondation de la formation initiale des médecins.  L’enjeu est de taille : 3 ans après la dernière réforme des études, de nouvelles évolutions s’imposent afin d’adapter l’enseignement médical à l’augmentation du numerus clausus, à la lutte contre la «désertification médicale», aux défis sanitaires, aux progrès techniques et à l’évolution des pratiques. A l’issue de ces deux journées, plusieurs propositions ont été formulées qui inspireront la nécessaire modernisation des études médicales. Plus de 1 000 enseignants-chercheurs, étudiants, praticiens, élus, autorités de tutelle, associations de patients… ont participé aux débats.
 
Premières pistes de réflexion
–       intégration de notions médico-économiques dans la formation,
–       formation à la dimension relationnelle du métier : «savoir communiquer» et améliorer la relation médecin/patients et médecins /autres professionnels de santé,
–       ouverture de la formation à la gestion en santé publique avec la possibilité d’adapter la formation aux objectifs des politiques de santé,
–       coopération entre professionnels de santé (praticiens et gestionnaires) pouvant aller jusqu’au transfert de compétences et de délégations des tâches,
–       faire aboutir très rapidement la réforme du troisième cycle (Internat et post-Internat) qui prend en compte l’évolution des spécialités et le besoin de praticiens complètement formés (acquisition des savoir, savoir-faire, savoir être et aussi mise en responsabilité pendant au moins un an en fin de formation) au moment de l’obtention du Diplôme"
 
Au cœur des controverses : la 1ère année commune et l’ultra-spécialisation
Enjeux de régulation et de spécialisation, la réforme de la Première année commune des études de santé (PACES) et de l’Épreuve classante nationale (ECN)» Face à l’utra-spécialisation du métier médical (dans le sens du diagnostic et de la prise en charge), la PACES mise en oeuvre en 2010 avait pour objectif d’ouvrir la formation médicale, de constituer un socle commun de connaissance aux métiers de santé tout en permettant d’éviter le caractère de « couperet » pour les étudiants échouant au numerus clausus. Cette réforme a fait l’objet de la controverse organisée pendant les Etats Généraux entre le Professeur Dominique Perrotin, Doyen de la faculté de Tours, et le Professeur Bernard Sèle, Doyen honoraire de la faculté de Grenoble. Remettant tous deux en cause la réforme, le premier prône l’instauration d’une sélection en amont de la première année, tandis que le second propose de supprimer toute sélection, en faisant « sauter le verrou du numerus clausus », qualifié de « sélection par l’échec », et en développant un système LMD. Cet échange a également permis de mettre en exergue la question de la régulation, le système de formation ne pouvant absorber les dizaines de milliers d’étudiants qui se pressent aux portes des facultés de médecine sans rogner sur la qualité de la formation dans un grand nombre de facultés.
Les conséquences de l’ultra-spécialisation
Le recentrage des médecins sur les aspects spécifiques de leur métier pose la question de la maîtrise l’ultra-spécialisation. Si cette dernière est devenue une nécessité en raison de l’évolution des techniques et de l’exigence de résultats, il s’agit aujourd’hui de savoir à quel niveau placer le curseur de spécialisation, notamment pour éviter le cloisonnement. Les professionnels de la formation médicale prônent l’instauration d’une formation commune à des métiers multiples, en organisant une mutualisation d’enseignements entre étudiants de différents parcours. Il s’agirait de constituer un socle commun de connaissances dans une logique d’études de santé.

Ils ont dit

«La qualité de la formation initiale est garante de la qualité des soins en France.» Professeur Patrice Deteix, Président de la Conférence des Doyens des facultés de Médecine
 
«Le Docteur en médecine doit se concentrer sur ce qui constitue le coeur de son métier, c’est-à-dire l’esprit de décision et déléguer le reste à d’autres professionnels de santé.» Professeur Guy Vallancien, Université Paris-Descartes. Selon lui de nouveaux métiers doivent émerger pour palier à l’absence de professions intermédiaires notamment entre les IDE et les médecins comme «l’infirmière praticienne» dont le rôle serait de suivre les patients atteints de maladies chroniques.
 
« A l’avenir, le métier de médecin ne s’exercera plus de manière solitaire. Le médecin de demain devra être un grand communicant avec ses patients mais aussi avec son environnement – les autres professionnels de la santé, les politiques et les gestionnaires.»  Pofesseur Jacques Bringer, Doyen de la faculté de Médecine de Montpellier.

De nombreuses personnalités qualifiées ont pris part aux échanges : la Secrétaire d’Etat Nora Berra, Jean-Luc Harousseau, Président de la Haute Autorité de Santé, Claude Evin Directeur général de l’ARS Ile-de-France, ou encore Alain-Michel Ceretti, Défenseur des droits. 
 
A propos de la Conférence des Doyens des facultés de Médecine
La Conférence des Doyens des facultés de Médecine rassemble les doyens des 37 facultés de médecine françaises. Présidée par le Professeur Patrice Deteix, elle a pour vocation de promouvoir, défendre et améliorer la qualité de la formation de tous les médecins. Au carrefour de tous les aspects de la pratique médicale, elle veille au développement de l’esprit de recherche et du sens critique chez les étudiants ; par la pédagogie, les facultés de médecine sont comptables de la qualité des soins délivrés aux patients. Force de propositions au sein de plusieurs instances consultatives : la Commission Pédagogique Nationale des Etudes de Santé, le Groupement de Coopération Sanitaire «Coordination Nationale des CHU-CHR en matière de Recherche et d’innovations médicales», la Commission Scientifique Indépendante du Développement Professionnel Continu, etc.. la Conférence a inspiré plusieurs réformes dont celle de l’Internat et du Post-Internat
 

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