PLFSS 2021: un budget d’exception, des dépenses sans précédent sur fond de crise sanitaire

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 constitue "l'un des exercices les plus singuliers depuis sa création (en 1996), tant au vu de la crise sanitaire et de son impact sur les finances sociales qu’en raison des transformations structurelles qu’il porte", annoncent ses instigateurs lors de sa présentation le 29 septembre avant transmission pour avis au Conseil d'Etat. Avec à la clé, un budget d'exception pour faire face à la crise et un déficit record de l'Assurance maladie.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 constitue "l’un des exercices les plus singuliers depuis sa création (en 1996), tant au vu de la crise sanitaire et de son impact sur les finances sociales qu’en raison des transformations structurelles qu’il porte", annoncent ses instigateurs lors de sa présentation le 29 septembre avant transmission pour avis au Conseil d’Etat. Avec à la clé, un budget d’exception pour faire face à la crise et un déficit record de l’Assurance maladie.

La mise en oeuvre du Ségur de la santé

Le premier engagement traduit par ce projet de loi est celui du Ségur de la santé avec des revalorisations historiques des salaires des personnels hospitaliers et des EHPAD : 8,8 Md€ ajoutés à la trajectoire de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) pour 2020–2023 et un ONDAM en hausse de 6% en 2021 hors crédits crise COVID
A cela un investissement massif dans l’immobilier en faveur des établissements de santé et médico-sociaux de 19 Md€. Outre les revalorisations salariales et les innovations organisationnelles, les annonces du Ségur de la santé se concrétisent avec la création d’un comité national d’investissement en santé, dédié au champ sanitaire.

Forfait patient aux urgences et modèle de financement populationnel

L’année 2021 constituera un tournant dans la mise en oeuvre de cette feuille de route avec l’entrée en vigueur de 4 réformes majeures : réformes du financement de la psychiatrie et des soins de suite et de réadaptation (SSR), ainsi que de celles des urgences et des hôpitaux de proximité.
Les urgences se verront dotées d’un modèle de financement unique entre secteur public et privé avec une participation forfaitaire pour les patients. Cette participation nommée Forfait Patient Urgences (FPU) serait due par tous les assurés pour chaque passage aux urgences non suivi d’une hospitalisation.
Le PLFSS pour 2021 prévoit de pouvoir expérimenter sur cinq ans un modèle mixte de financement des activités hospitalières de médecine, alternatif au financement à la tarification à l’activité intégrale, combinant à l’échelle territoriale une part de financement à l’activité, une part de financement à la qualité et une part de financement dit "populationnel" assis sur des critères de besoins de soins des patients du territoire. L’introduction d’une part de financement territorial populationnel, décorrélé de la production de soins, contribuera à inciter les acteurs à mettre en place une meilleure gradation de l’offre entre proximité et expertise, à renforcer le recours à l’ambulatoire et à s’engager dans des actions de prévention et de coordination permettant in fine d’améliorer la pertinence des soins.
Dès 2021, en préfiguration du financement populationnel, les établissements de santé qui le souhaiteront pourront bénéficier d’une forme de dotation socle en lieu et place d’une partie de la tarification à l’activité pour leurs activités de médecine, après contractualisation avec l’ARS sur des objectifs de qualité des prises en charge et de réponse aux besoins du territoire.

Poursuite du développement de la télémédecine

La prise en charge à 100% par l’Assurance-maladie du remboursement des actes de téléconsultation est poursuivie pendant deux ans. Cette prolongation doit permettre aux professionnels de santé de s’équiper des outils nécessaires à la facturation et au paiement à distance des téléconsultations.
Le PLFSS 2021 pérennise les maisons de naissance, lieux d’accompagnement faiblement médicalisés et personnalisés des femmes enceintes et de leur bébé prévoit un soutien au développement des hôtels hospitaliers, hébergements non médicalisés expérimentés à proximité des hôpitaux et proposés sur prescription médicale.

Une réponse forte à la crise sanitaire

15 Md€ de dépenses exceptionnelles ont été engagées par l’assurance maladie pour répondre à la crise sanitaire en 2020, notamment pour les achats de masques et équipements de protection des soignants, les respirateurs, les tests-PCR, la réorganisation des soins et les recrutements.
L’ONDAM 2020 a été relevé de 7,6% et une provision de 4,3 Md€ de l’ONDAM 2021 est prévue au titre des tests, vaccins et masques.
5,2 Md€ sont consacrés aux mesures pour venir en aide aux entreprises les plus touchées par la crise pendant la phase de reprise et compensés par le budget de l’Etat

La création de la branche "autonomie" entérinée

Le PLFSS 2021 acte la création d’une cinquième branche de l’assurance maladie pour le soutien à l’autonomie. Une branche nouvelle au sein du régime général et gérée par la CNSA. Celle-ci devrait être à l’équilibre dès son démarrage grâce au financement par la CSG des mesures de revalorisation salariale dans les EHPAD. 2,5Md€ seront consacrés aux mesures nouvelles pour le soutien à l’autonomie en 2021, dont 1,4Md€ au titre des revalorisations salariales dans les EHPAD. À partir de 2024, la réaffectation d’une fraction de CSG devrait procurer 2,3 milliards d’euros par an.
L’ONDAM médico-social augmente de 6,4% pour les personnes âgées et 0,9% pour le handicap. Il octroie 25,8 Md€ dont 13,4 Md€ pour le grand âge et 12,4 Md€ pour le handicap.

Allongement du congé paternité et amélioration des droits sociaux

Le PLFSS 2021 prévoit, à compter du 1er juillet 2021, un doublement du congé paternité et d’accueil de l’enfant. La durée des congés en cas de naissance d’un enfant sera ainsi allongée à 28 jours d’arrêt total, soit un mois, contre 2 semaines aujourd’hui.
L’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI) est par ailleurs revalorisée. Après une première revalorisation réalisée en 2020, la hausse du niveau de l’allocation sera poursuivie en 2021, garantissant un niveau de ressources de 800€ par mois pour une personne seule, contre 750€ en 2020.
L’ASI était jusqu’alors financée par l’Etat. A compter de 2021, elle sera à la charge de la branche maladie par cohérence avec le financement des prestations d’invalidité.

Accès à l’innovation et mesures de simplification

Le nouveau plan met en oeuvre une refonte des dispositifs des autorisations temporaires d’utilisation (ATU) pour permettre un accès plus rapide des patients aux médicaments innovants et donner une meilleure visibilité aux acteurs et le enforcement de l’encadrement de la qualité des prestataires de services et distributeurs de matériel médical.
Parallèlement, le processus de simplification admistrative se poursuit. La possibilité s’ouvre pour les entreprises de l’économie collaborative de s’acquitter sur une plateforme en ligne des cotisations sociales sans avoir à créer une entreprise. Par ailleurs, la fusion des déclarations sociales et fiscales de revenus est actée pour les 400 000 travailleurs indépendants agricoles.

Des dépenses d’assurance maladie sans précédent

La progression des dépenses d’assurance maladie a atteint un niveau sans précédent pour répondre aux besoins exceptionnels de la crise et aux décisions structurelles en faveur du secteur hospitalier. En 2020 les dépenses liées à la crise sanitaire et à la mise en oeuvre des premières mesures du Ségur de la santé ont conduit à dépasser l’ONDAM de 10,1 Md€, pour atteindre 215,7 Md€ (au lieu de 205,6 Md€ prévus en LFSS 2020). Le déficit du régime général et du FSV est de 44,4 Md€ en 2020.
12,5 Md€ de dépenses d’assurance maladie supplémentaires impactent, du reste, sur 2021 (hors dépenses liées à la COVID 19) avec +6% d’évolution du taux de l’ONDAM en 2021 (hors crédits crise COVID).
Ce PLFSS marque pour finir "la nécessité de rétablir la soutenabilité financière de la sécurité sociale, fortement impactée par la crise", insistent ses auteurs..
Les mesures de régulation intégrées à la construction de l’ONDAM 2021 s’élèvent à 4 Md€ et sont articulées autour de quatre thématiques principales en lien avec la pertinence des prises en charge: la structuration de l’offre de soins (0,8 Md€), les baisses de prix sur les médicaments (0,6 Md€) et sur les dispositifs médicaux (0,1 Md€), la pertinence et la qualité des soins en ville (1 Md€), la pertinence et l’efficience des arrêts de travail et des transports (0,3 Md€).
Pour en savoir plus : PLFSS 2021
Betty Mamane

Commentaires

Il n’y a pas encore de commentaire pour cet article.

Sur le même sujet

Simuler un attentat ou une tempête pour préparer aux situations d’urgence 

Après l’impressionnant déploiement du “Shelter”, hôpital mobile du CHU de Toulouse, ce fut au tour du projet “SENS” d’être présenté lors de la dernière édition de SantExpo. SENS, ou autrement dit un centre de simulation environnementale et neurosensorielle de 140 m2, ayant la capacité de recréer diverses situations extrêmes pour préparer au mieux les professionnels de l’urgence à des crises majeures. Un projet attendu sur le site de l’hôpital Purpan en 2024.

A Santexpo, des CHU de France en transition(s)

Pour la deuxième année consécutive, les 32 CHU ont affiché leur unité à l’occasion de Santexpo, salon qui a réuni du 23 au 25 mai l’écosystème de la santé. S’il est difficile d’évaluer les retombées réelles pour les établissements, ce rassemblement sur deux stands et une même bannière (CHU de France) aura eu le mérite de faire valoir un certain nombre de thèmes, dont les transitions numérique, écologique ou sociale au sein de l’hôpital. A défaut d’énumérer tout ce que nos caméras ont pu capter d’échanges sur ces trois jours, la rédaction vous propose de revivre dix temps forts.

Vincent Vuiblet : “L’IA va profondément modifier l’ensemble des fonctions hospitalières.” 

Connaissance des maladies, aide aux diagnostics, dépistage précoce, prise en charge des patients, prédiction de l’efficacité des traitements ou encore suivi des épidémies… dans la santé comme dans d’autres domaines, l’Intelligence artificielle est promise partout. Si les perspectives semblent vertigineuses, difficile de saisir ce que cette évolution technologique, que certains appréhendent comme une “révolution”, implique réellement. A l’occasion de SantExpo, nous avons interrogé Vincent Vuiblet, Professeur de médecine au CHU de Reims et directeur de l’Institut d’Intelligence Artificielle en Santé Champagne Ardenne depuis 2020, sur ce sujet particulièrement d’actualité. L’occasion pour lui de nous éclairer, de balayer aussi un certain nombre d’idées reçues et de fantasmes.

Le CHU de Bordeaux aux petits soins avec ses nouveaux internes

Le 15 mai dernier, deux cent six nouveaux internes ont été accueillis au Grand Théâtre, bâtiment phare de la capitale girondine et propriété du CHU de Bordeaux. Un événement en grandes pompes voulu par Yann Bubien, peu de temps après son arrivée en tant que Directeur général.

A saint-Étienne, cette nouvelle clinique soigne les champions comme les sportifs du dimanche

Ouverte depuis novembre dernier, la Clinique Universitaire du Sport et de l’Arthrose (CUSA) accueille dix-sept praticiens travaillant de concert pour soigner les problématiques qui entourent l’appareil locomoteur. Et si son plateau technique de pointe voit défiler les sportifs de haut niveau comme les amateurs, c’est une autre population, touchée par l’arthrose et autres douleurs articulaires, qui prend massivement rendez-vous. Reportage.