Suicide : une étude inédite de l’AP-HP pour une meilleure prévention des récidives

Mieux évaluer les risques suicidaires, mieux adapter la prise en charge des patients et prévenir les récidives: tels sont les objectifs de l'étude menée ces derniers mois aux urgences psychiatriques de l'hôpital Bichat-Claude Bernard AP-HP. Des résultats publiés dans la revue Psychiatry Research.
Mieux évaluer les risques suicidaires, mieux adapter la prise en charge des patients et prévenir les récidives: tels sont les objectifs de l’étude menée ces derniers mois aux urgences psychiatriques de l’hôpital Bichat-Claude Bernard AP-HP. Des résultats publiés dans la revue Psychiatry Research
Cette enquête épidémiologique a porté sur 168 patients (dont 2/3 de femmes) accueillis suite à une tentative de suicide afin de mieux cerner leur profil socio-démographique et clinique. Au sein des urgences de l’hôpital Bichat-Claude Bernard, ces personnes ont été prises en charge par les équipes psychiatriques de l’AP-HP et du GHT Paris Psychiatrie & Neurosciences (secteurs du 17e et 18e arrondissements) sous la coordination du Dr David Duroy, du Pr Enrique Casalino et du Pr Michel Lejoyeux, également chercheurs à l’UFR de Médecine de l’université Paris-Diderot.
La première étude du genre au sein des urgences parisiennes
Chaque année, en France, 10 000 personnes mettent fin à leur jour et près de 200 000 commettent une tentative de suicide, rapporte l’Observatoire national du suicide. Près de 3 personnes sur 100 ont déjà commis au moins une tentative de suicide au cours de leur vie, prévalence qui reste parmi les plus élevées d’Europe. 
Environ 80% des personnes ayant commis une tentative de suicide sont vues au sein des services d’urgence. Mais peu de travaux de recherche se sont intéressés aux caractéristiques démographiques et cliniques de ces patients et jusqu’à présent, aucune étude n’avait été menée au sein d’un service d’urgence parisien.
Pas de lien avéré entre la récidive et la volonté de mourir
Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont distingué deux groupes de patients à haut risque suicidaire : les primo-suicidants et patients récidivistes (51 %). D’autre part, les patients dont le principal motif de passage à l’acte était la volonté de mourir (36 %), qui ont été comparés aux patients invoquant tout autre motif tel que l’appel à l’aide, le besoin de soins, de repos, de mise à distance, ou la volonté d’adresser un message à leur entourage.
Les résultats n’ont pas mis en évidence d’association entre la récidive et la volonté de mourir et suggèrent, au contraire, que ces deux groupes de patients pourraient présenter des profils cliniques et des parcours de prise en charge distincts. 
Les urgences, un point d’entrée dans le système de soins psychiatriques
Comparés aux primo-suicidants, les patients récidivistes étaient plus nombreux à avoir déjà bénéficié d’une prise en charge psychiatrique/psychologique au cours des six derniers mois et à avoir déjà été hospitalisés en psychiatrie.
Ce n’était pas le cas des patients ayant souhaité mettre fin à leurs jours, qui rapportaient pourtant plus d’idées suicidaires au cours du mois précédant le passage à l’acte. Suite au passage aux urgences, ces derniers étaient d’ailleurs plus souvent hospitalisés dans un service de psychiatrie, que suivis en ambulatoire. Pour ces patients en particulier, le passage aux urgences et, éventuellement, leur hospitalisation subséquente, représenteraient des moments privilégiés pour prévenir les idées suicidaires et la récidive. 
Extension de l’étude à d’autres services d’urgences parisiens
Les auteurs précisent que ces résultats demandent à être répliqués de manière plus large, mais qu’ils témoignent d’ores et déjà de la nécessité de ne pas considérer les patients suicidants comme un groupe homogène, tant dans les études épidémiologiques que dans la mise en place de stratégies de prévention. Ils encouragent également à accorder plus d’attention aux trajectoires de soins des patients à haut risque suicidaire et à adapter en conséquence la prise en charge qui leur est offerte.
A terme, la généralisation de ce projet à différents services d’urgences parisiens pourrait permettre de mieux adapter la prise en charge de ces patients et les stratégies de prévention de la récidive.
Source : 
Psychiatry Research, 22 mars 2017

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